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Sport Publié le 13 mars 2024 | Le Nouveau Réveil

REPORTAGE / Korhogo : Développement de l'orpaillage artisanal et clandestin : Les villages de Kombolokoro et Wayiri au bord d'un affrontement

© Le Nouveau Réveil
REPORTAGE / Korhogo : Développement de l'orpaillage artisanal et clandestin : Les villages de Kombolokoro et Wayiri au bord d'un affrontement

Nous sommes dans la sous-préfecture de Nionfoin, Département de Korhogo, dans la Région du Poro. Là-bas, deux villages voisins, Kombolokoro et Wayiri, entretiennent des risques de conflit communautaire. Au cœur du litige, des terres entières bradées au profit de l’orpaillage clandestin. Tandis que les populations de Wayiri sont favorables à cette activité d’orpaillage clandestin, celles de Kombolokoro s’y opposent. Face à l’évolution de la situation et les intérêts en jeu, les recettes pour le dénouement de cette crise semblent échapper aux autorités coutumière, administrative, judiciaire et élus de la localité. Pendant ce temps, l’activité se poursuit avec la destruction des terres.


Les origines de la crise


Ce conflit qui persiste depuis quelques mois démarre avec l’arrivée massive d’orpailleurs dans le village de Wayiri pour exploiter les gisements d’or de la localité. Une situation inacceptable par les habitants de Kombolokoro, un autre village situé à trois kilomètres de là, qui oppose un refus catégorique. Parce que, selon eux, cette pratique va détruire leurs terres et modifier leurs conditions d’existence, eux, qui vivent d’agriculture.


Menaces environnementales


Sans repère et confrontée à des difficultés économiques croissantes, cette activité d’orpaillage clandestin est une aubaine pour les nombreux jeunes de la localité qui ne maîtrisent pas forcément son impact sur leur vie. En effet, l’usage des produits chimiques comme le cyanure et le mercure, d’ailleurs toxiques dans l’extraction de l’or pollue le sol, le sous-sol, contamine les cours d’eau et les récoltes qui, à la longue, vont créer des problèmes de santé dans la région. Conscients donc de la dangerosité de cette pratique, les habitants de Kombolokoro n’ont pas hésité à faire savoir à qui de droit leur désaccord en accusant le village de Wayiri de détruire le patrimoine commun en causant des préjudices aux générations futures.


Les faits selon le chef du village de Kombolokoro


Exacerbé par ces tensions autour de ce litige foncier du fait de l’orpaillage, le chef du village de Kombolokoro, Fournan Yéo, affirme en présence des habitants, surtout les jeunes que, ce sont leurs parents généreux et hospitaliers qui ont cédé une partie de leurs terres pour la création du village de Wayiri. Et aujourd’hui, considérés comme des frères, les habitants de Wayiri accueillent à leur grande surprise des orpailleurs pour détruire ces terres qui constituent leur source d’existence. « C’est notre terre et c’est nous qui avons installé les gens de Wayiri. Nous sommes des cultivateurs ; c’est ce que nos parents nous ont légué en héritage. Il se trouve que nos frères de Wayiri ont installé des orpailleurs venus d’un pays de la sous-région pour pratiquer l’orpaillage clandestin depuis quelques temps. Nous sommes opposés catégoriquement. Nous avons plusieurs fois fait part de notre position aux autorités locales, en précisant le danger que cela représente pour nous. Sans oublier les vives tensions entre nos deux villages du fait de la présence de ces orpailleurs clandestins. Au moment où je parle, nous avons des blessés à l’hôpital », a longuement expliqué le chef Fournan Yéo. Ce point de vue du chef est d’ailleurs partagé par les jeunes du village de Kombolokoro qui se disent prêts à chasser de leurs terres ceux qu’ils considèrent comme des envahisseurs.


Pour le représentant du président de ces jeunes, Fougnigué Yéo, l’orpaillage clandestin est un phénomène à éradiquer dans leur localité. « Nous ne voulons pas de l’or ; nous voulons cultiver. Que le gouvernement vienne nous sauver. Ces orpailleurs détériorent nos terres et ils veulent nous tuer », a-t-il lancé en détresse. Selon Tchibenan Soro, leur président des jeunes en question est détenu à la prison civile de Korhogo. Il a été arrêté à cause de ce conflit qui les oppose au village de Wayiri dont les jeunes de Kombolokoro exigent sa libération.


Le village de Wayiri livre sa version des faits


Approché pour savoir ce qu’il en est, le chef du village de Wayiri, Djomomplé Soro et sa notabilité rejettent en bloc ce qu’ils considèrent comme des accusations portées par les populations de Kombolokoro. Pour le chef de Wayiri, la question de l’orpaillage clandestin brandie par les habitants de Kombolokoro est un prétexte pour les déposséder de leur patrimoine foncier. Un détour sur les sites d’orpaillage, sur place, le constat est alarmant. Des dizaines de trous à profondeur inestimable, disséminés un peu partout dans la nature ; le sol totalement détruit. Pourtant interrogés, les jeunes de Wayiri ont évité la question de l’orpaillage clandestin, en évoquant plutôt le conflit lié à la terre avec les habitants de Kombolokoro.


La Brigade de gendarmerie de Nionfoin accusée de favoritisme


A Wayiri, nous avons été pris à partie par des jeunes révoltés accusant les médias de partialité. Fort heureusement, nous avons été secourus par les éléments de la Brigade de gendarmerie de Nionfoin qui venaient d’arriver sur les lieux. Selon des témoins, le chef de cette même brigade est malheureusement souvent mis en cause dans cette affaire. Puisque certains habitants de Kombolokoro pensent que la gendarmerie favorise et protège ces individus qui détruisent leurs terres. Donc, cela porte à croire qu’il y a corruption à ce niveau.


Refus de coopération du commandant de Brigade de Nionfoin


Cité à plusieurs reprises dans les propos, nous nous déportons à Nionfoin située à une vingtaine de kilomètres de Kombolokoro et une quarantaine de kilomètres de Korhogo à la rencontre du commandant de Brigade de gendarmerie pour recueillir sa version des faits. Celui-ci a catégoriquement refusé de répondre à nos questions, en nous indiquant de nous référer à sa hiérarchie pour toute déclaration officielle. Ce refus de coopérer du chef de Brigade laisse penser qu’il existe quelques soucis de transparence dans la gestion de cette crise communautaire liée à l’orpaillage clandestin dans cette localité du Nord de la Côte d’Ivoire. Partant, les habitants de Kombolokoro pourraient se conforter dans leur soupçon de partialité et de corruption émanant de la Brigade de Nionfoin. Ce qui se passe dans cette localité est dramatique en termes de destruction environnementale. Les tensions communautaires entre ces deux villages Kombolokoro et Wayiri risquent de dégénérer à tout moment. En attendant l’apaisement dans la localité, cette activité illicite d’orpaillage bat son plein au grand dam des habitants de Kombolokoro.


V.S


In Le Nouveau Réveil / Mercredi 13 Mars 2024 - N°6566

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