Abidjan- Face à la proposition du président des États-Unis, Donald Trump, de déplacer les populations palestiniennes de Gaza, plusieurs dirigeants arabes ont réaffirmé leur engagement ont exprimé leur désaccord.
En opposition ferme avec les propos, mardi 4 février 2025, du président Trump qui voudrait « prendre le contrôle » de l’enclave palestinienne, l’Egypte et la Jordanie ont réitéré leur refus d’accueillir les Gazaouis qui en seraient chassés. L’Arabie Saoudite, sur la même ligne, balait toute tentative de négociation.
La proposition de Trump
Donald Trump a réitéré mardi lors d'une conférence de presse conjointe avec le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, l’idée d’un plan visant à envoyer les Palestiniens de ce territoire vers l’Egypte et la Jordanie pour obtenir la paix.
"Si l'on regarde ce qui s'est passé au fil des décennies, on constate qu'il n'y a que des morts à Gaza. Cela fait des années que cela se produit. Il n'y a que des morts. Si nous pouvons obtenir une belle zone pour réinstaller les gens, de façon permanente, dans de belles maisons où ils peuvent être heureux et ne pas se faire tirer dessus, ne pas se faire tuer et ne pas se faire poignarder à mort comme ce qui se passe à Gaza. Je ne pense pas que les gens devraient y retourner. On ne peut pas vivre à Gaza en ce moment. Je pense que nous avons besoin d'un autre endroit. Je pense qu'il faut un endroit qui rende les gens heureux", a déclaré le président américain lors d'une conférence de presse conjointe avec le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu.
Selon lui, un "ménage " devrait être fait parmi la population. "Je préférerais m’impliquer avec certaines nations arabes et construire des logements à un autre endroit où ils pourraient peut-être vivre en paix pour une fois ", a-t-il ajouté suggérant un déplacement " temporaire ou à long terme ".
"Les États-Unis prendront le contrôle de la bande de Gaza, et nous ferons du bon travail avec elle. Nous en serons les propriétaires et nous serons responsables du démantèlement de toutes les bombes dangereuses non explosées et des autres armes qui se trouvent sur le site", a-t-il poursuivi.
Réactions de la Jordanie et de l'Egypte
Lors d’un entretien téléphonique avec le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, Sa Majesté le Roi Abdallah II de Jordanie a insisté sur la nécessité d’un soutien accru aux Palestiniens afin qu’ils puissent obtenir pleinement leurs droits légitimes. Le souverain jordanien, le roi Abdallah II a dénoncé les activités de colonisation et rejeté toute tentative d’annexion ou de déplacement forcé des Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie.
« La Jordanie s’oppose fermement à toute tentative de modification démographique dans les territoires palestiniens », a déclaré le roi Abdallah II, tout en appelant la communauté internationale à intensifier les efforts pour assurer un cessez-le-feu durable et permettre l’acheminement de l’aide humanitaire aux populations affectées.
La Jordanie, qui accueille 2,3 millions de réfugiés palestiniens, a maintes fois exprimé son rejet de tout projet visant à en faire une « patrie alternative ».
Lors d'une rencontre mercredi 05 janvier 2025, avec le Premier ministre et ministre palestinien des Affaires étrangères Mohammad Mustafa, le ministre égyptien des Affaires étrangères Badr Abdelatty a réitéré le soutien de l'Égypte aux droits du peuple palestinien et à la recherche d'une solution à deux États basée sur les frontières d'avant 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale d'un État palestinien indépendant, pour prévenir de futures violences.
Les deux ministres ont discuté de la situation humanitaire à Gaza, soulignant la nécessité d'accélérer les projets de reconstruction, d'enlèvement des décombres et d'acheminement de l'aide. Ils ont insisté sur la nécessité de permettre aux Palestiniens de rester à Gaza.
L’Arabie saoudite maintient sa position intransigeante
L’Arabie saoudite a, de son côté, réaffirmé sa position selon laquelle aucune normalisation des relations avec Israël ne pourra avoir lieu sans la création d’un État palestinien indépendant. Dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères, le Royaume a souligné son engagement ferme envers la cause palestinienne, rappelant les déclarations du prince héritier Mohammed bin Salman lors de récents sommets arabes et internationaux.
« L’Arabie saoudite ne cédera pas sur l’exigence de la création d’un État palestinien sur les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale, avant toute normalisation avec Israël », indique le communiqué.
« Son Altesse Royale le Prince Mohammed bin Salman bin Abdulaziz Al Saud, Prince héritier et Premier ministre, a réaffirmé clairement et sans équivoque cette position lors de son discours à l’ouverture de la première session de la neuvième session du Conseil de la Choura le 18 septembre 2024. »
Le communiqué rappelle que le prince héritier a réitéré l’engagement du royaume lors du sommet arabo-islamique tenu à Riyad le 11 novembre 2024, soulignant la nécessité d’un État palestinien basé sur les frontières de 1967 et la fin de l’occupation israélienne des territoires palestiniens.
Le Royaume a également appelé la communauté internationale à prendre des mesures concrètes pour mettre fin aux souffrances du peuple palestinien et garantir la reconnaissance de ses droits légitimes. « Une paix juste et durable ne pourra être atteinte que si les droits des Palestiniens sont pleinement respectés », a insisté Riyad.
Les pays européens rejettent également la proposition du président des Etats-Unis
La France a réagi aux propos de Donald Trump, se disant opposée "à tout déplacement forcé de la population palestinienne de Gaza", estimant qu'il s'agit d'"une violation grave du droit international".
Le Premier ministre australien, Anthony Albanese, a déclaré que son gouvernement continuait à soutenir une solution à deux États au Moyen-Orient "où Israéliens et Palestiniens pourraient vivre en paix et en sécurité".
"La position de l'Australie est la même que ce matin et que l'année dernière", a précisé Anthony Albanese lors d'une conférence de presse.
Le Royaume-Uni s'opposera à toute initiative visant à déplacer les Palestiniens de la Bande de Gaza vers les pays arabes voisins, a déclaré le gouvernement britannique, jeudi.
« Il ne saurait y avoir de déplacement forcé de Palestiniens, ni de réduction du territoire de la Bande de Gaza », a déclaré, devant la Chambre des Communes, la ministre d’Etat britannique au Développement, Anneliese Dodds.
« Le Royaume-Uni est convaincu de la nécessité d'une solution négociée à deux États, avec un État palestinien souverain, comprenant la Cisjordanie et Gaza, aux côtés d'un État d'Israël sûr et sécurisé, avec Jérusalem comme capitale commune, » a ajouté Anneliese Dodds.
Selon elle, la priorité du gouvernement britannique reste de veiller à ce que « le fragile cessez-le-feu se poursuive, que tous les prisonniers soient libérés, que l'aide indispensable parvienne à Gaza et que nous puissions effectivement reconstruire cette voie menant à une paix durable ».
« Il appartient aux Palestiniens de déterminer l'avenir de Gaza avec le soutien des États de la région et de l'ensemble de la communauté internationale. Nous nous opposerons à toute velléité de déplacement des Palestiniens contre leur volonté vers les États arabes voisins. Il ne saurait y avoir de déplacement forcé de Palestiniens, ni de réduction du territoire de la Bande de Gaza », a poursuivi la ministre travailliste.
La Russie a critiqué, mercredi, le plan de Donald Trump visant à prendre le contrôle de la bande de Gaza, qualifiant son projet de manifestation de la ‘’cancel culture’’ occidentale (culture de l’annulation, ndlr).
S'exprimant lors d'une table-ronde sur l'Ukraine avec les ambassadeurs à Moscou, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a fait valoir que cette ‘’culture de l’annulation’’ est désormais devenue particulièrement évidente en ce qui concerne la situation au Moyen-Orient.
Mettant en avant les décisions du Conseil de sécurité de l'ONU, le chef de la diplomatie russe a déclaré que ces décisions ‘’qui ont été reconnues par tout le monde sans exception il y a un mois et demi comme étant une base nécessaire pour les actions visant à créer un État palestinien, ont tout simplement été annulées’’.
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